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Jeudi 29 avril 2010:
tentative de scission à la chambre…
d’un hôpital

2010




Jeudi matin alors que je m'éveillais à peine dans une chambre aux portes et rideaux bleus et aux murs jaunes de l'hôpital Iris sud d’Ixelles, quelqu'un frappa et entra.
-Monsieur Fransolet?
-Heu... oui dis-je en levant les yeux légèrement vers ce visiteur matinal.
-Bonjour, je suis le Docteur Bart-Jan Van Halle-Vilvoorde. Je viens au sujet de l'opération de scission de vos cordes vocales.
-Mes cordes vocales, oui... mais... mais... mes cordes vocales ne doivent pas être coupées, il faut seulement retirer un polype dis-je de la même voix cassée que je trainais depuis plusieurs semaines et qui expliquait ma présence dans cette chambre d’hôpital.
-Non, non, Monsieur Fransolet, il faut couper. Il s'agit d'une anomalie et il faut couper.
-Mais non, non, non, il n'en est pas question, cela n'est pas de cela dont il s'agit, il faut procéder à l'ablation de cette tumeur bénigne, rien de plus dis-je à l'homme en observant sa chemise noire et son costume qui comme sa cravate étaient tellement jaunâtres qu’il était difficile de ne pas les fixer.
-Comment cela non, vous ne pouvez rien dire d'autre que non apparemment. Bah si vous ne pouvez dire que non, c'est bien la preuve que vous n'avez pas besoin de vos cordes vocales. Allez, Monsieur Fransolet, cinq minutes de courage et vous en êtes quitte dit encore l'homme au costume jaunâtre en caressant son abondante barbichette blonde.
-Mais... non. D'ailleurs ce n'est pas vous qui devez m'opérer. Il s'agit d'un certain Badrin... Badel… ou je ne sais plus, je ne retiens jamais son nom, un Egyptien, je pense...
-Allons, allons, que me racontez vous là? Un chirurgien égyptien qui s’appelle Scalpel, voilà qui promet, pourquoi pas un Hollandais tant que vous y êtes me répondit le prétendu Docteur Van Halle-Vilvoorde alors qu'il venait de sortir un bistouri de sa trousse.
-Mais écoutez, on ne joue pas ainsi avec la voix d'un être humain, non, non, non dis-je encore. Je suis prêt à en parler, à en discuter, à négocier même mais pas sous la menace. D'ailleurs cette intervention se fait par la bouche, il ne faut couper ni mes cordes vocales ni ma gorge.
-Par la bouche, écoutez, non, je vous aime bien mais quand même... et puis même anesthésié, vous ne cesseriez pas de rêver de me mordre, mordre du terrain, vous ne pensez qu’à cela, n’est ce pas Monsieur Fransolet. Répandre encore un peu votre sale petite huile frelatée tout autour de vous, en oubliant qu’autour de vous, ce n’est plus chez vous. Vous me faites penser à une pierre maléfique jetée dans un lac qui laisserait des sillons indélébiles. Vous ne faites pas le moindre effort pour vous diluer un tant soit peu, c’en est assez. Vous ne polluerez plus mon lac, mon lac restera pur. Cinq minutes de courage, Monsieur Fransolet, je ne vous demande rien de plus dit encore mon visiteur à la barbichette blonde en s’approchant de plus en plus de mon lit.
-Mais il n'en est pas question, d'ailleurs si vous voulez passer en force, moi je..., moi-je... lui dis-je terrorisé par un autre bistouri qu'il venait de sortir de sa trousse et bien plus grand que le précédent, tellement énorme que je me demandai même comment il avait pu le sortir de sa petite trousse. Non, Non, Non, criai-je encore avec l'énergie du désespoir en levant le bras vers une sonnerie qu'une infirmière avait placée la veille au dessus de mon lit.
Drrrrrrrrrrrrrrrrriiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiinnnnnnnnnng!

Quelques heures plus tard, le Docteur égyptien m'opéra et tout se passa très bien. C’était un bourrelet, pas un polype me dit-il après l’intervention. Je le revis le lundi suivant et il me confirma cette nouvelle rassurante avant de me renvoyer à un logopède de manière à retrouver pour de bon cette fois, ma voix normale.